lundi 4 mai 2009

“We’ll never give up on new investments,”

“We’ll never give up on new investments” , "nous ne renoncerons jamais aux investissements". Cette phrase extraite d'une conférence de presse d'un dirigeant d'un des plus grands armateurs chinois donne le ton. En plein marasme économique. Ce genre de nouvelle n'est évidement pas de nature à rassurer l'actionnaire privé sur l'avenir financier de cette entreprise.

Nous ne dramatiserons inutilement pas la nouvelle de Bloomberg. La construction et le lancement de nouveaux navires de commerce tient plus de la nécessité sociale impérative que la myopie financière.

Les autorités chinoises ont mis en place une politique d'incitation forte à l'investissement. Politique massive contra-cyclique destinée à forcer l'allure en cette période marquée par un retrait de la grande exportation, majoritairement à destination des pays de l 'OCDE. Les industriels suivent. C'est en l'espèce simple et justifiable. Au moins court terme.

Cette politique donne d'ailleurs déjà des résultats conformes aux attentes des dirigeants dans la mesure où les volumes nominaux d'investissement ont cru de manière spectaculaire. On lira à ce propos avec intérêt les post du blog de Michael Pettis. Lequel nous alarme utilement sur l'étranglement du secteur des PME et de l'économie de services, un véritable avant-poste de la consommation locale. Signe que l'économie chinoise est toujours dans la logique précédente.

Je suis persuadé, comme Michael, de la nécessité de voir l'économie chinoise se re-balancer en faveur d'une économie faisant une plus large part au consommateur local. Et tout autant convaincu que l''étranglement en cours du secteur des PME trahit vraisemblablement la difficulté qu'a le pays à re-concevoir partiellement ce qui a fait la force de la Chine depuis une vingtaine d'années. De ce point de vue, c'est la question majeure du moment. Pour l'ensemble de la planète.

La question n'est pas aujourd'hui de savoir si cet argent dépensé en 2009 va irriguer utilement et efficacement le tissu économique chinois ou, à l'inverse, accroitre ses déséquilibres actuels et, in fine, ceux de l'économie mondiale. Finalement peu importe à court terme. La véritable interrogation porte sur la capacité d'un pays à revoir un "modèle économique de développement" qui a fait ses preuves. La Chine peut à court terme continuer sur les rails mis en place durant la décennie précédente. Mais au delà, comment le pays pourra-t'il infléchir ses axes de développement ?

Il convient d'être réaliste sur ce plan. Un grand pays revoit rarement sinon jamais ses fondamentaux de développement. Lesquels sont d'abord le fruit de son histoire, de sa culture et des évènements et surtout du "génie" de son propre peuple. La volonté politique et des orientations des dirigeants n'interviennent qu'à titre subsidiaire. Elles ne sont bien souvent que l'"art du possible".

En l'espèce, la situation est un peu différente. Les autorités chinoises disposent effectivement d'une marge de manœuvre. Une capacité à maitriser le cours des choses qui est à la fois financière - en raison de ses réserves de change - et politique - grâce à un remarquable parcours depuis Mao.

Pour autant, il ne faut pas négliger un facteur essentiel, la brutalité du retournement de cycle. Il est peu probable que l'économie mondiale retrouve la dynamique qui a marqué le début des années 2000. Et il n'est plus envisageable de continuer la partie en cours, la fameuse globalisation, dans ses conditions récentes marquées par des déficits commerciaux structurels massifs.

La Chine doit trouver dans un avenir relativement proche - disons deux à trois années - de nouveaux ressorts pour sa croissance. Les échanges internationaux se retrouvent fragilisés par l'insécurité croissante de ses instruments de paiement, y compris ceux réputés les plus solides, les monnaies de compte internationales. Et seul un ré-équilibrage progressif des balances commerciales les plus détériorées peut permettre d'éviter le pire.

La Chine doit s'inscrire dans ce mouvement. De la voitures à l'électronique grand public, et au secteur du luxe et du tourisme la planète a besoin de de voir le citoyen chinois arbitrer par sa consommation personnelle la situation économique et financière en cours.


Si les autorités chinoises tentent de forcer financièrement le pays dans une direction trop unilatéralement productiviste et mercantiliste via des investissements massifs dans les infrastructures publiques et industrielles, les marges de manœuvre pourraient disparaitre très rapidement. Et le pays manquer ses chances historiques. Et ce d'autant plus rapidement que ces investissements auront été conçus dans un esprit qui risque de devenir rapidement terriblement old hat.

Old hat les usines ultra-modernes sans le moindre client, les infrastructures portuaires sans activité, les capacités sidérurgiques en plein marasme international ... La photo-souvenir pourrait prendre des allures de désastre.

On suivra donc avec intérêt les évenements à venir et on continuera de guetter les nouvelles issues de Chine et portant sur les choix de développement et sur l'inflation.

Concernant le premier point, les choix de développement, le débat interne n'est pas hélas réellement accessible en direct pour des raisons tant linguistiques que politiques. On est le plus souvent réduit à l'anecdote. Comme dans le cas mentionné aujourd'hui. Et c'est dommage.

Le second plan - la politique monétaire - est encore plus crucial. encore La politique de reflation massive des investissements - est elle-même une conséquence directe des flux monétaires extérieurs. La masse monétaire chinoise croit et d'autant plus que ses taux de change ont été fixés à un niveau fixe arbitrairement bas.

La politique monétaire est souvent plus lisible que les débats proprement politiques, quelque soit le régime politique. Et c'est pourquoi on doit pouvoir se pencher avec intérêt sur les déclarations et les décisions de la banque centrale de Chine. Au même titre que sur celles de ses alter ego des autres grands pays industriels. Je tenterai de le faire pour mes lecteurs dans les mois à venir. Car il s'y joue sans aucun doute une part du succès de la mécanique économique mondiale des dix prochaines années.