jeudi 19 février 2009

Sur le retour à un étalon-or

Un post un peu long en réponse à une question portant sur l'éventualité du retour à un étalon-or. Ma réponse courte est non. Ma réponse longue suit ...

Lorsque les monnaies sont saines, on les oublie. Elles constituent comme l'infrastructure électrique d'EDF en France, le réseau routier ou la présence, plus abstraite d'un système juridique efficace et juste, une sorte de préalable évident. Tellement évident que l'on finit par les considérer comme des acquis permanents. Que nenni !

Nous sommes sortis de la situation de stabilité monétaire mis en place par Paul Volcker progressivement depuis la fin des années 90. Après le premier coup de chien spéculatif déjà oublié - la fameuse "nouvelle économie" - on est passé au vif du sujet. Une crise immobilière qui finit par apparaitre pour ce qu'elle est, une crise non pas strictement financière mais monétaire. Et ce même pour les moins vigilants. savoir les économistes et les banquiers ...

Évidemment une crise monétaire a de profondes répercussions économiques. Car les mécanismes du crédit se dérèglent. Au point de rendre difficile voire impossible des projets longs, surtout les projets privés. Les bons comme les mauvais.

Peut-on rétablir le courant ? Évidemment. En sauvant les monnaies désormais en situation délicates ? Oui encore. Mais cela implique des efforts douloureux, notamment en termes de taux d'intérêt et de politique de refinancement. Personne ne souhaite les réaliser ...

In fine on constatera que la bonne monnaie aura chassé la mauvaise. C'est a peu près tout ce que l'on sait... L'échange peut se passer de monnaie fiable. Le crédit ne le peut pas.

Cette bascule sur des bases plus saines aura-t'elle lieu rapidement ? J'en doute. Sous quelles formes cette bascule aura-t'elle lieu ? Celle d'un étalon-or ? Personnellement je ne le pense pas. Détaillons.

L'or va dans un premier temps aller rejoindre les poches les plus fortunées. Et ce partout sur la planète. Ce sont les riches qui fixent la valeur des choses. Avec un arbitraire confondant. Tant par leurs gouts alimentaires - ils adorent certains œufs de poisson et autres mets curieux - que par leurs choix patrimoniaux.

La revalorisation de l'or est donc en cours. Dans cette absolue discrétion qui sied aux fortunes privées. Ces dites fortunes très largement favorisées par la mondialisation sont les maitres du jeu en la matière.

Les banques centrales vont-elles suivre et au dépens de leur positions cash ? A court terme, ce ne n'est pas sûr.
Car les grands argentiers n'ont pas le même agenda. Et des maitres terriblement tyranniques, les politiques.

Sur ce point les autorités chinoises et leurs banquiers ont dit, montré et démontré leur attachement au système-papier et précisément au système dollar et à ses corolaires, notamment le "pegging" agressif de leur monnaie.

Et ce en complet accord avec les autorités américaines, monétaires et politiques. Un jeu dangereux de "tu imprimes du dollar - j'achète et j'imprime du yuan" qu'il faudra bien arrêter un jour. Car c'est un jeu de dupes.

Et c'est pourquoi que l'on ne peut pas imaginer aujourd'hui une remonétisation de l'or. Tous s'y refusent. Du moins à court terme. Mais in fine les fortunes privées pourraient bien mettre tout le monde d'accord. Sur la valeur monétaire de l'or et sur celles des monnaies gagées sur le courage des politiques.

Vaste programme.

PS: un lecteur me fait remarquer que j'oublie de mentionner dans ce jeu monétaire à deux - US et Chine - le rôle non négligeable joué par les parties tierces, BCE et BoJ. Je pense qu'elles restent relativement secondaires même si les responsabilités sont largement partagées sur la planête. Comme toujours dans ces domaines.

mercredi 18 février 2009

Faudra-t-il choisir entre Euro et construction communautaire ?

Au vu des derniers éléments largement diffusés - et vraisemblablement manipulés en partie par les média anglo-saxons, il semble que l'affaire soit claire et entendue :

"L'Euro ne vaut désormais guère mieux que la livre britannique. Selon les analystes, les montants prêtés à l'Est de notre continent par nos banquiers, helvètes inclus, sont de nature à faire trébucher l'Euro."

Les marchés ne se sont pas privés depuis deux jours de spéculer comme à la parade sur ces informations. Qui ne sont comme toujours ni validées, ni vérifiées.

Il serait temps que Bruxelles dote l'ensemble européen d'une comptabilité financière digne, y compris dans la réalités de ses flux financiers privés ! Mais là n'est pas le cœur du sujet.

La question du moment, celle qui fait notamment trébucher la monnaie suédoise et vaciller l'Euro, est bien celle de la nature de la solidarité financière européenne.

Si l'on choisit de sauver le niveau de vie, hélas largement artificiel de nombreuses régions d'Europe via des mécanismes de redistribution massifs, l'Euro va perdre son statut de monnaie solide, l'inflation déraper. Et les problèmes réapparaitre plus aigus encore dans peu de temps.

Si l'on choisit de sauver l'Euro fort, c'est à un effondrement des monnaies slaves qu'il faut s'attendre. Et à celui vraisemblablement plus silencieux d'une bonne part du système bancaire européen. Tant au Nord qu'au Sud de la zone.

La solution se trouvera entre ces deux écueils. Entre une gestion solidaire jusqu'à l'inconséquence. Ou une autre, plus dure aux limites du Thathcherien....

Quelque soit les solutions, il faut le dire désormais clairement, les tigres économiques de l'Est et du Sud de l'Europe n'étaient depuis quelques temps que tigres de papier. Le papier croissant de leur endettement privé. Et ce depuis vraisemblablement plus de cinq ans.

Revenons au concret. A savoir la remontée de la livre, excessive et spéculative et la baisse de l'Euro. L'Euro est effectivement attaqué. Mais l'affaire n'est terminée. Car cette attaque est avant tout un large coup de poker spéculatif.

On surveillera l'attitude des allemands qui sont maitres du jeu. Les décisions politiques ne sont pas écrites. Une socialisation trans-continentale imbécile des pertes des cigales détruirait l'Euro fort. Mais elle n'est ni assurée ni écrite. Surtout pas dans les statuts. Même si elle reste envisageable.

Placés en métal jaune, nous conservons donc pour l'instant le solde de notre épargne en monnaie commune. Sur des échéances courtes. Et attendons que l'Europe fasse le bond politique qu'elle doit désormais impérativement réaliser. Rapidement. Pour la mise en place sans gabegie excessive de plans de sauvegarde à l'Est et au Sud de notre continent.

Les goldeux sont sereins et invitent - par la gestion vigilante de leur épargne - les dirigeants politiques de nos pays à réfléchir au sens des évenements en cours. Et à s'inspirer dans la conduite des affaires publiques de personnalités telles que Jacques Rueff ou Ludwig Erhard. Plutôt que celles d'Alan Greenspan ou de Ben Bernanke...

mardi 10 février 2009

Sa disparition n'attriste et n'alerte personne, Et pourtant ...

Quand elle a disparu, personne n'en parle et pourtant elle manque énormément. On évite d'en parler pour qu'elle ne s'éloigne plus encore. Mais elle a disparu depuis longtemps et pour longtemps. Et ne reviendra que lorsque l'on aura fait les efforts nécessaires.

De quelle disparition s'agit-il ? De celle de la confiance. De celle que nous avons tous dans les instruments financiers et monétaires.


Cette confiance utile lorsqu'on échange des matières premières, nécessaire lorsque l'on échange des biens industriels sophistiqués, indispensable lorsque l'on souhaite obtenir ou proposer du crédit. Et plus encore lorsque ce crédit doit être proposé sur des échéances longues.

Le crédit EXIGE la confiance. Et le degré d'exigence est à la hauteur du crédit souhaité, de son volume et surtout de sa durée. Des tartuffes veulent nous faire croire qu'il est possible relancer le crédit long dès maintenant. Qui plus est à l'international. Et sans revenir sur les fondamentaux.

Des esprits faibles souhaitent y croire. D'autres plus lucides savent qu'il est virtuellement impossible ACTUELLEMENT de re-mettre en place des mécanismes de crédit privé long suffisants pour relancer les pans de l'économie qui en ont vraiment besoin ...

L'argent va manquer pour les projets longs. Pour les moins justifiables et notamment cet immobilier pléthorique qui est entrain de saturer des pays à la natalité littéralement en implosion, c'est un retour au bon sens. Et c'est bien. Pour les investissements dont la planète a encore cruellement besoin - de la production de ressources essentielles, de l'énergie à l'eau et notamment, c'est excessivement dommage ...

L'argent mal investi a disparu. Il faudra reconstituer cette épargne gaspillée.

Il va falloir restaurer la confiance dans les acteurs du système et, plus encore, celle que l'on peut porter aux instruments monétaires. C'est un préalable au re-démarrage pas un accessoire à régler une fois en route ...

Et oui car il y a ce chiffre fâcheux de deux milles milliards de dollars. Le dernier chiffre retenu pour les pertes réalisées autour de la distribution de produits obligataires toxiques US.

A ce stade on oubliera les accessits, l'immobilier ibérique, britannique ou slave et bien évidemment les monstrueuses surcapacités mises en place en Asie... Dont personne n'a entrepris de mesurer l'ampleur. En Chine notamment où elles sont littéralement enfouies dans les bilans de banques d'état. Mais l'ampleur des pertes enfouies entre les banques de ces pays double vraisemblablement la donne. A quatre ou cinq mille milliards de dollars. Une part significative de l'épargne nette de l'épargne mondiale exprimées en monnaie scripturale.

Cette destruction d'épargne constitue effectivement la plus grande spoliation financière de l'histoire de l'humanité. Elle va déclencher en contrecoup une régression de l'épargne fiduciaire - le mot savant pour l'épargne en moyens monétaires - et des vagues inflationnistes qui seront à la hauteur des pertes réellement encaissées.

Dans ce bourbier la seule issue macro-économique raisonnable se trouve au niveau national. Chaque pays - ou zone monétaire - peut tenter de remettre son système financier en ordre et en route. De manière autonome et singulière. Et permettre à la confiance de revenir.

Les actions transnationales qui vont être menées pour déserrer l'étau de la crise en cours vont contribuer encore un peu plus à détruire la valeur des en-cours de crédit réalisés ces dernières années.

Ne rêvons pas. Ce ne sont ni Obama ni Brown représentants de "paniers percés" sans mauvaise conscience ni complexes qui détiennent la clé de cette remise en marche. Mais les dirigeants modestes de pays plus modestes, moins ambitieux et beaucoup moins télégéniques. Ni Keynesiens ni monétariste. Attention aux miroirs aux alouettes... Ces dirigeants n'auront ni le soutien des média si celui des foules endettées. Pour de bonnes raisons ...

Que cela signifie-t'il pour l'épargnant de la zone Euro ?

Que la crise n'est pas finie et qu'elle ne verra pas son terme en 2009. Les préalables d'une économie saine ne sont pas en place. Même dans la zone Euro, pourtant modérément perturbée.

Si vous souhaitez garder confiance, faites l'impasse sur la mégalomanie des dirigeants.

Examinez, lorsqu'ils apparaitront les signes d'une remise en place. Elle sera "régionale" au sens de la planète. Le marin espère voir la zone Euro faire partie de ces zones du monde qui vont retrouver les mécanismes de cette confiance.

La confiance en ce domaine ne passe ni par la démagogie ni par la facilité.

Comme toujours en matière financière, les programmes efficaces ne sont pas ceux qui plaisent aux peuples. Mais ceux qui rendront à nouveau possibles le retour à un système financier favorisant à sa juste valeur l'épargne. Et la mise en place de mécanismes de crédit sains équilibrés et économiquement justifiables.

Pour vos investissements et vos placements, ne faites pas abstraction de ces fondamentaux. Les conditions d'un retour à l'ordre financier et monetaires ne sont pas encore en place. Elles ne seront pas avant deux à trois ans. Au plus mieux et sous réserve que les dirigeants politiques ne succombent à une démagogie dictées par l'urgence politique. On peut penser que les européens sauront éviter l'écueil.

Entretemps chacun connait mes recettes faites de placements de père de famille et, pour les plus courageux, de shorts patients sur le Sud de l'Europe accompagnés de quelques paris sans risque sur les monnaies les plus exposées. De la livre britannique en passant par les monnaies fort mal arrimées des nouveaux venus aux modèle de consommation occidentale, à l'Est de notre continent.

On reviendra sur les marchés plus tard. Lorsque la mer aura retrouvé son bleu azur. Nous n'y sommes pas.