mardi 16 juin 2009

l'absolu naufrage de la science économique

Pouvez-vous m'indiquer le bureau qui a assuré le recrutement de Ben Bernanke ? Plus sérieusement il incarne avec son mélange de sureté scientifique et morale ce que l'Amérique peut produire de pire sur le plan politique : "Un honnête homme délivrant une politique qui ne l'est pas."

Intégré à un carcan intellectuel académique qui a patiemment ré-écrit l'histoire économique et la science associée depuis une cinquantaine d'années, il représente, hélas avec talent, ces courants de pensée qui, d'une relecture de Keynes à Friedman, prétendent que le comportement des entités macro-économiques peut être échapper au bon sens du commun des mortels :

Que le sur-endettement qui asphyxie le ménage ou la PME en fort peu de temps peut sauver le pays ou, mieux encore, une zone monétaire voire la planète entière ? Que les déficits macro-économiques massifs - commerciaux ou budgétaires - qui met à la porte le dirigeant d'entreprise peut stimuler l'économie.

On a le droit de souhaiter le retour dans les média d'un journalisme économique respectueux de notre bon sens et la citation d'économistes ayant réussi.

M'adressant à des épargnants sensibles à la sécurité apportée par le métal jaune, je citerai Rueff à qui notre banque nationale doit une bonne part de ses réserves d'or. Mais j'aurais pu appeler à la rescousse Wilhelm Röpke le père intellectuel du miracle financier allemand d'après-guerre ou tout bonnement Adam Smith ou Frédéric Bastiat. Sans oublier Karl Marx dont on reconnaitra que sa perception des crises du capitalisme a donné et donne encore de fort intéressantes clés de lecture sur notre vie économique. Notamment sur la crise en cours de mise en place en Chine.

On se refusera à citer ou à cautionner ceux qui ont contemplé sans un frémissement nasal, la tension qui se mettait en place de 2004 à la mi-2007 sur les marchés du crédit. Et moins encore à faire appel à leur science pour remettre en selle l'économie mondiale.

La science économique doit accepter son absolu naufrage. Et messieurs Gordon Brown et Ben Bernanke s'honoreraient à proposer leur démission.

PS: du même tonneau, sans fonds, Mike Sheldock rappelant à Krugman - pour qui il ne faut surtout pas reculer devant un risque inflationniste aux abonnés absents - une phrase nichée dans un edito de 2002 et désormais pleine de saveur. Une saveur très amère :

"Pour combattre la récession - NdT celle de 2001-2002 - la Fed n'a pas besoin de 'remettre la balle au centre'; elle a besoin d'une puissante demande des ménages pour compenser le volume moribond des investissements du monde des affaires. Et pour faire cela, ainsi que le propose Paul McCulley de Pimco, Alan Greenspan doit créer une bulle immobilière pour remplacer la bulle du Nasdaq".

Les termes sont précis et ils sont difficilement justifiables. Même hors contexte.

Que sommes-nous en droit d'attendre de celles et ceux qui ont structuré -par leur réflexions ou leur action - la vie financière de la planète ? Peut-être simplement de la décence et de l'humilité. On peut sérieusement craindre qu'elles ne fassent leur apparition trop tard. Au point d'endommager de manière difficilement réversible la confiance des acteurs à tous les niveaux.

mercredi 10 juin 2009

le prix du pain, le yuan et le cours du métal jaune

Une contribution qui fait suite à des comparaisons centrées sur les performances financières relative à long terme de l'or et celle de l'immobilier hexagonal dans un forum boursier à forte notoriété.

Vous noterez avec intérêt que ces analyses ont été réalisées sur des bases très diverses. Du prix du pain au cout de la main d'œuvre sans oublier le prix d'un simple repas. Mais le plus souvent la comparaison porte sur biens immobiliers localisés en France. En clair on compare le prix de l'once d'or fin - international et unique - à de celui de biens non circulants (non-tradable) et qui plus est des actifs potentiellement spéculatifs. C'est intéressant mais terriblement partiel et partial. Car la photo est évidemment à prendre sur une perspective historique longue mais également une échelle géographique globale, celle de marchés, désormais mondialisés.

Citons wikipedia sur les parités de pouvoir d'achat : "Dans un marché global et unifié, sans coût de transport, les produits identiques ont tous le même prix au même instant et à tous les endroits de ce marché." C'est évidemment loin d'être le cas actuellement.

Du cout de l'appareil photo numérique à celui de la voiture, les différentiels de parités de pouvoir d'achat ont actuellement un degré de distorsion rarement atteint. En dépit d'une mondialisation arrivée quasiment à son terme. Y compris les prix de gros ou encore prix industriels. Pour des raisons économiques, mais également en raison d'une sous-évaluation systématiquement mercantiliste des taux de change par les pays asiatiques. Un phénomène mal anticipé par les architectes et les nouveaux grands prêtres de la mondialisation.

Où le marin veut-il en venir ? A une considération majeure. Ces valorisations de notre immobilier sont faites localement dans notre pays et sur la base de parités monétaires largement instrumentées. Des parités artificielles qui ont entrainé, outre une accélération spectaculaire de la désindustrialisation de nos pays, des conséquences financières dont certaines sont particulièrement lourdes :

  1. la dépréciation accélérée dans nos pays de tous les biens facilement transférable et la surévaluation relative de tous les biens, actifs et services non circulables, ceux-ci ne pouvant donner lieu à des arbitrages sur les marchés internationaux,
  2. une perfusion massive des systèmes bancaires occidentaux à partir des ressources mises à notre disposition par nos créanciers internationaux dans le droit fil de leur politique de "sous-évaluation monétaire durable",
  3. la surévaluation mentionnée en 1. est accrue à due proportion des politiques de crédit mises en place pour les "biens immobiliers" considérés par nos banquiers comme des actifs financiers et donc susceptibles de bénéficier de leviers financiers à l'acquisition. Ces leviers ont atteint des niveaux sans précédent historique en dehors de la grande spéculation japonaise des année 80.

Si nous nous devons de mentionner le rôle joué par la Fed dans le bradage des taux d'intérêt durant la période qui a suivi la crise de 2001, c'est effectivement largement à l'instrumentation des parités par les grands pays asiatiques - sous la pression financière indirecte et très largement involontaire de Pékin - que nous devons ces prêts à long terme particulièrement bon marché qui ont fait levé depuis dix ans nos prix immobiliers comme de la pâte à pain. Et qui gonflent désormais, massivement et dans l'indifférence générale, la dette publique de nos pays.

Si les taux sont si faibles, les durées si longues et le banquier si aimable ... Cela ne doit rien au hasard. Et tout à la nécessité monétaire.

Tenez compte de ces puissants mécanismes dans votre anticipation de l'évolution de la parité entre le métal jaune et la valeur de notre parc immobilier. L'immobilier occidental a bénéficié d'une double stimulation.

Comme nous l'avons vu, contrairement aux biens industriels l'immobilier est par nature intransportable et n'est pas sujet à aux considérables arbitrages négatifs qui ont pesé sur les biens industriels. Notre parc immobilier a de plus bénéficié - en qualité d'actif financier - du soufflé monétaire en cours. Pensez-vous que cela soit amené à durer en cas de modification du paysage monétaire et financier ?

Je ne prendrai pas le pari que nos partenaires commerciaux internationaux continuent à se porter acquéreurs de nos dettes, même élégamment emballées et dument garanties par nos banques voire nos institutions publiques, si nous cessons de leur assurer des excédents massifs ...